Vieillir, au moins une fois par année

La base fondamentale de l’humain assure au moins une chose, il vieillit. Au moins une fois par année. Il ne vieillit pas de la même façon, pas dans la même tête ni dans le même corps. Il vieillit parfois seul, parfois bien entouré. Il vieillit en santé mais aussi dans la maladie, le cœur remplie de souvenirs ou de regrets bien enfouis. Chaque année on lui attribue un chiffre qui vient souvent avec un paquet de suppositions non fondées.

  • T’as 16 ans pis t’as pas ton permis?
  • T’as 20 ans pis t’as pas de chum?
  • T’as 25 ans pis t’as pas de métier?
  • T’as 30 ans pis t’as pas d’enfant?
  • T’as la quarantaine pis t’as pas de maison?

On nous répète que ce n’est qu’un chiffre qui change rien, mais on nous rappelle sans cesse ce qui devrait venir avec lui. Biens matériels, santé, carrière, famille…

Mais surtout ce n’est pas une raison d’angoisser!

Fack c’est la boule au ventre que tu t’efforces d’avancer en essayant de pas y penser. Mais chaque jour elle te rappelle que t’as une peur fulgurante de tout oublier. Oublier ce que t’as vécu, les gens que t’as rencontrés. T’as peur d’oublier ce qui t’a mené jusqu’ici, ce qui a fait de toi qui tu es. Tu le sais que c’est irrationnel d’avoir peur du temps qui passe mais tu le sais quand même que c’est ça la source de tes angoisses. T’as peur que la vie soit trop courte, de pas avoir le temps d’aimer jusqu’au dernier souffle, d’embrasser chaque jour que le soleil voudra bien se lever. T’as peur de pas pouvoir réaliser tous tes grands rêves. Même les plus p’tits t’as peur de passer à côté. T’as peur de voir partir les gens que t’aime juste parce que tu voudrais jamais que ça s’arrête, cette belle vie là. Tu penses beaucoup trop à la fin sans trop te rendre compte que des fois ça t’empêche d’être toute là quand ça compte vraiment, maintenant. Je sais que tu te sens prise à la gorge quand tu penses qu’un jour toi aussi, tu seras pu là. Ça te fait mal en dedans de dire qu’il y a une fin à tout ça.

T’as eu peur de te faire briser le coeur et maintenant qu’il est réparé, t’as peur de ne plus jamais pouvoir le partager. T’as panser des blessures qui t’ont marquées comme personne ne pourrait se douter, t’as su éclairer chacune des noirceurs qui sont venues te hanter mais tu continues d’avoir peur que le temps puisse s’écouler?

Je sais que t’as peur que le temps passe parce qu’on t’a répété que tu y arriverais pas, que de toute façon tu ferais pas ce qui faut. Je sais qu’on t’a fait croire que t’en faisais pas assez pis quand tu donnais tout ce que t’avais on te disait que t’aurais pu faire mieux. Je sais que t’as tellement cru en ces mots que t’as arrêté de croire que ces gens pouvaient se tromper. Je sais que tu leur as donné raison parce que tu savais plus comment éviter leur déception.
On t’a fait sentir que tu manquerais de temps pour accomplir ce qui « devrait être accompli à ton âge » si t’accélérais pas le pas, si tu faisais pas les bons choix.

Quand tu regardes autour de toi, tu te sens en retard sur le reste du monde, comme s’il y avait une marche à suivre, une date limite pour traverser la ligne d’arrivée. Comme si une année de plus, une ride qui s’est creusée ou un cheveux blanc camouflé pouvait t’arrêter. Je te rappelle que t’as toute la force du monde pour affronter ce qui pourrait te chambouler, pour construire toutes les réussites qui te font rêver. T’as la force de t’élever au-dessus de ce qui te fait angoisser, t’as même la force de soulever ceux que t’aime quand ils auront besoin d’un peu de légèreté.

Au final ils avaient raison pour une chose…c’est juste un chiffre. Un chiffre qui te fera grandir ou avec lequel tu te sentiras un peu perdue parfois. Un chiffre qui te rappellera d’où tu viens et qui te fera te demander où tu t’en vas. Un chiffre que tu chériras ou que tu haïras. C’est juste un chiffre qui va changer plus rapidement que tu le voudrais réellement. Un chiffre qui reviendra pas.

Un chiffre que tu regarderas partir avec autant de difficulté que tu l’as vu venir.

Anabelle Pallagrossi
Anabelle Pallagrossihttp://lespaceurbain.com
Constamment à la recherche de nouveautés et de changements, je me nourris de passion, de rêves et de photographie (et d’un peu / pas mal d’impulsivité aussi). Je me décrirais comme étant une vieille âme qui déteste vieillir mais qui aime ce qu’elle devient avec le temps. L’un de mes plus grands rêves serait d’augmenter le nombre d’heures dans un journée afin d’avoir le temps de réaliser tous les autres !

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